​​J’ai réfléchi à la manière de transposer en vidéo la relation dispositif/contexte développée dans l’œuvre Dos à dos. Il en résulte une série d’explorations : EDR, un projet en trois volets composé d’un dispositif de miroir, de captation et de projection vidéo en direct. L’adaptabilité du dispositif m’a permis de me concentrer sur les aspects contextuels à chaque lieu, en utilisant les mêmes éléments pour les trois versions, mais organisés différemment selon l’espace et la visée du projet.  

 

La première version du projet (EDR : 2 pour 1) a été réalisée dans un lieu public, au restaurant-bar La Cuisine à Québec. Le dispositif comprend une caméra vidéo, un projecteur et deux volumes muraux d’égales dimensions peints en blanc. L’un des deux volumes sert de surface de projection, l’autre présente une surface miroir parallèle à la surface de projection. Fixées côte à côte sur le grand mur du restaurant, les deux boîtes murales font face au comptoir du bar et à l’aire de cuisine. D’un côté, une caméra en circuit ouvert filme droit devant elle en direction du miroir en ne cadrant que celui-ci. L’image captée est projetée simultanément sur la surface de projection voisine et inversée par la fonction « miroir » (ou rétroprojection) du projecteur. 

 

Dans l’ensemble, il y a donc l’espace réel (celui dans lequel on se trouve), l’espace réel réfléchi dans le miroir, puis l’espace réel réfléchi dans le miroir qui est capté par la caméra et projeté en temps réel sur la surface de projection.

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Ces deux représentations en mouvement de l’espace réel — différentes médiations du présent — se côtoient dans l’espace dans une même expérience continue. Derrière le bar, les employés préparent et servent à manger dans cette zone légèrement surélevée par rapport au reste de la salle. Les serveurs debout et en mouvement, les clients assis au comptoir ou aux tables, rencontrent différents points de vue de l’environnement réfléchi par le miroir en fonction de leur propre perspective. L’angle de la caméra étant fixe par rapport à celui-ci, un décalage spécifique pour chaque spectateur s’opère entre les deux images de même origine. L’image du flux actuel, captée en temps réel dans le miroir par la caméra, est transformée en une image constante pour tout le monde par sa projection sur la surface à côté du miroir qui lui, reflète simultanément une image unique, spécifique à chaque spectateur dépendamment de sa position dans l’espace. L’immédiateté du présent est représentée par des intermédiaires qui, en quelque sorte, la matérialisent, alors que le reflet du miroir est une image perdue à jamais.